Dans le chapitre précédent, Mark Kuchner partageait des informations pratiques sur les ventes (ou comment « vendre » une idée). Mais le marketing ne se résume pas à cela.
Au bout du compte, le but du marketing est bien plus profond : il s'agit de tisser des liens pour des relations honnêtes qui fonctionnent sur le long terme.
Ceci risque de vous demander d'ajuster vos représentations... Voici le marketing 2.0 résumé en quelques paragraphes par l'auteur :
Les campagnes de marketing traditionnelles des années 80 (et avant) se concentraient davantage sur la publicité et le prix : on « poussait » un produit vers les foules. Il y avait un mur entre les grandes entreprises et leurs clients, un mur qui leur interdisait tout rapprochement : l'écran de télévision. C'est sans doute le paradigme que la plupart des scientifiques ont à l'esprit lorsqu'on leur parle de marketing. (...)
Mais l'arrivée d'Internet a provoqué une révolution dans le monde des affaires (...)
Amazon.com, Tripadvisor.com et Yelp.com ont commencé à mettre en avant les avis des internautes dans leurs fiches produit. Ces avis peuvent souvent faire ou défaire la réputation d'un nouveau produit (...) Dès lors, comment une simple affiche ou une pub télé pourrait-elle vous convaincre d'acheter un produit que vos amis et d'autres consommateurs vous invitent à éviter ? Les entreprises se sont rendu compte que si elles voulaient réussir, elles ne pouvaient plus dire aux gens ce qu'ils devaient acheter ; elles devaient se joindre à la conversation planétaire sur ce qui est bon et ce qui ne l'est pas. Telles des amis, elles se devaient d'être présentes, honnêtes, personnelles et prêtes à partager. Aujourd'hui, plus elles entretiennent de profondes relations de proximité avec leurs clients et mieux elles se portent.
L'auteur fournit un exemple très convaincant de ce qu'il entend par là avec l'histoire de TCHO, une marque de chocolat qui a su adapter son offre à la véritable demande en demandant directement à ses clients de concevoir le chocolats qu'ils aimeraient manger.
Avec l'exemple de TCHO en tête, je voudrais parler du tissage de liens, de la création de relations, comme d'un nouveau pilier du marketing, et en profiter pour vous donner quelques outils qui devraient, je pense, vous aider dans votre vie de scientifiques.
De quels outils parle-t-il ? Dans la mesure où les passages du livre sont plutôt explicites, je vais intervenir le moins possible dans ce qui suit et laisser les citations faire leur boulot.
Le plus important des outils pour construire des relations est simple : vous devez rester sincère et authentique (...) Vous ne pouvez pas vous servir du marketing pour masquer les défauts d'un travail scientifique médiocre ou qui ne tient pas la route (...) Retenez ceci : les bonnes pratiques du marketing doivent être en phase avec l'éthique scientifique.
L'auteur insiste sur le fait que se soucier sincèrement de l'autre fait partie intégrante de n'importe quelle relation.
Peut-être n'êtes-vous pas familier(e) avec ce concept, alors voici une petite introduction :
Pensez à votre snack préféré et à toutes les personnes qui en ont entendu parler sans l'avoir essayé. Il y a les clients qui l'ont vu dans un magasin et qui se disent qu'ils vont peut-être l'acheter. Il y a les consommateurs qui en mangent régulièrement. Il y a même des consommateurs qui l'achètent tout le temps et qui en donnent à leurs amis. Alignez toutes ces personnes, de la grande masse de prospects pas trop au courant aux rares accros et prosélytes et vous obtenez une sorte d'entonnoir qu'on appelle le « parcours d'achat ».
OK, et alors ?
Vous devez conduire les gens à travers cet entonnoir via des interactions positives (...) Vous devez leur offrir quelque chose qui les interpelle à chaque étape du parcours.
Si vous voulez des exemples, lisez le livre ;)
Nous sommes peut-être intelligents, mais nous sommes mal à l'aise en soirées. Toujours coincés à l'intérieur de notre propre tête !
Rencontrer les gens en chair et en os, quand on n'est pas spécialement extraverti, relève toujours un peu du défi...
Voici une formule pour rompre la glace, adaptée du livre « Comment parler à tout le monde devenir un as de la communication pour réussir dans la vie et se faire des amis » de Leil Lowndes :
1) Mettez-vous dans l'ambiance en vous imaginant en train de retrouver un vieil ami cher que vous n'avez pas vu depuis des années ;
2) Tournez tout votre corps vers cette peronne ;
3) Faites une pause d'une seconde et examinez attentivement les yeux de la personne ;
4) Et maintenant... Faites un grand sourire chaleureux !
Imaginez qu'un jour vous receviez une lettre d'une entreprise dont vous n'avez jamais entendu parler vous demandant d'acheter ses produits et de dire à tous vos amis à quel point le produit est merveilleux. De toute évidence, vous jetteriez la lettre directement au papier recyclé. Ce n'est as du tout du bon marketing. Seth Godin, le pape du marketing, n'hésite pas à faire une analogie entre guider un client dans le parcours d'achat et le jeu de séduction qui peut exister entre deux amoureux au début d'une relation. L'idée, c'est que quand vous construisez une relation, vous devez prendre votre temps et ne pas griller les étapes.
Il ne s'agit pas juste de dire ce que vous avez à dire... Mais d'écouter et de répondre !
Dans le monde des affaires, il est recommandé de parler d'autre chose que des affaires.(...) Un hobby ou une passion commune peuvent grandement aider à construire une relation.
Mais l'auteur admet que cela peut ne pas sembler très naturel aux scientifiques :
Voici un point où les monde des affaires et de la science semblent différer. Dans le business, une relation démarre en parlant de la pluie et du beau temps puis on parle affaires. En sciences, la séquence semble être l'exact inverse.
Alors... Bonne chance avec ça !
Cela semble peut-être évident, mais une piqûre de rappel ne fait jamais de mal :
Organiser une fête, ou se rendre à une fête, est une manière formidable de rencontrer des gens et de tisser des liens.
Cela peut se traduire en « monter une conférence », bien sûr.
Un meeting scientifique ou une conférence fonctionne de la même manière : l'idée est de faire en sorte que vos invités se sentent choyés, qu'ils aient l'impression de se rendre à un événement passionnant.
Je n'avais jamais pensé à cela comme un moyen de tisser des liens sur le long terme, mais en y réfléchissant, j'avoue que l'auteur marque un point.
Chacun d'entre nous a été une fois ou l'autre la « nouvelle personne ». Mark Kuchner se souvient très bien de ces situations :
quelques personnes faisaient le premier pas vers moi, le nouveau. Ce sont des personnes que je n'oublierai jamais et je leur envoie encore des clients (...) Maintenant, c'est mon tour. Dans ces situations, j'essaie d'être attentif aux nouveaux (...) Il n'est pas évident de savoir si mon aide sera récompensée un jour, ni comment. Mais le théorème fondamental du marketing nous dit qu'aider les autres est le seul moyen d'obtenir ce que l'on désire. Et ça fait toujours du bien d'aider.
Encore un bon outil que je n'avais jamais vu sous cet angle...
Quand quelqu'un vous rend un service, cette personne vous apprécie en fait encore plus après et sera encore plus encline à vous rendre service par la suite. On appelle parfois ce phénomène l'effet Benjamin Franklin, parce que Franklin en a parlé dans son autobiographie : « Celui qui vous a, un jour, fait une gentillesse sera d'autant plus prêt à vous en faire une autre que celui à qui vous-même en avez faite une. » (...)
Si nous rendons service à un étranger, nous nous sentons obligés de justifier cette action. Nous nous racontons une petite histoire : je suis une personne attentionnée et mes efforts ont été judicieusement investis car j'aime bien la personne que j'ai aidée. On finit par croire à cette histoire. Et c'est ainsi qu'on la rend vraie.
Une fois encore, il ne s'agit pas d'être un vil manipulateur. Mais juste de se souvenir qu'au royaume de la communication (et ce n'est pas le seul à mon avis), se montrer sympa les uns envers les autres, finit par payer d'une manière ou d'une autre, de manière qu'on n'arrive jamais à prévoir.
Dans le monde des affaires, on a l'habitude du rejet. Apparemment, c'est plus dur pour les scientifiques.
La première expérience de rejet, pour de nombreux scientifiques, se produit quand ils se voient refuser une bourse ou un poste. C'est un vrai choc.
De toute évidence, l'auteur a dû apprendre à la dure que subir un échec ou être un échec, ne sont pas du tout la même chose.
Quand j'ai commencé à envoyer des demandes d'emploi pour des postes en sciences et que ma candidature a été rejetée, cela a ramené à la surface des souvenirs de rejet dans la cour de récréation, de rejets par des femmes, par la famille. De plus en plus profonde, la douleur ne s'arrêtait plus. J'avais le sentiment d'être pris dans un tourbillon de doutes personnels et de frustration.
Mais il apprend vite ;)
L'une des principales leçons du marketing, c'est que si vous ne rencontrez pas le succès, cela ne veut pas dire que vous êtes mauvais ou médiocre. Cela veut juste dire que ce que vous offrez ne correspond à aucun besoin du moment ou que vous n'avez pas réussi à convaincre quelqu'un que vous êtes la personne de la situation pour répondre à ce besoin.
Il a même compris comment tourner en avantage ce qu'il percevait jusque là comme une menace :
Dans la vie, si vous voulez faire des choses intéressantes, vous devez passer par des épisodes de rejet. Cela dépend de vos ambitions. Si tout ce que vous voulez vous tombe tout cuit du ciel, c'est sans doute que vous avez placé la barre trop bas. Si vous visez plus haut, fatalement, de temps en temps, vous allez manquer la cible. On pourrait même dire que les gens qui ont du succès sont arrivés là où ils sont parce qu'ils ont pris des risques et dû affronter le rejet.
Oh, et apparemment, il sait de quoi il parle
(D'ailleurs, le présent livre a été rejeté par seize éditeurs avant que les gens d'Island Press reconnaissent son potentiel et sa beauté intérieure.)
Il y a plusieurs nuances de « non », elles ne signifient pas toutes que vous devez arrêter :
« Non » ne veut pas toujours dire « Vous êtes une mauvaise personne et je vous déteste pour toujours ». Parfois, cela veut juste dire « Non merci, pas cette fois. »
Ici encore, l'auteur a l'air de nous servir une platitude, mais il faut reconnaître qu'il a raison. Nous apprécions tous un « Bravo ! Beau travail, bien joué » quand quelqu'un s'intéresse à nos travaux, pas vrai ?
Peut-être qu'en chacun d'entre nous survit un enfant de deux ans qui s'entraîne au pot et qui a soif d'encouragements et de félicitations pour un travail bien fait.
Faire un commentaire positif de temps en temps semble être encore plus important dans le monde scientifique :
Les scientifiques ne sont en général pas très doués quand il s'agit de se féliciter mutuellement, sans doute de peur de donner l'impression d'avoir des standards peu élevés, de lécher des bottes ou d'en faire trop (...) Et nos amis et familles ne comprennent bien souvent pas ce que nous faisons suffisamment bien pour nous féliciter de nos prouesses (...) Nous sommes souvent en manque de commentaires positifs.
Comme le dit l'auteur :
C'est fou comme le temps peut aider à rendre les relations plus profondes.
Une fois encore, cela peut sembler évident... Mais nous devrions tous garder à l'esprit que toute excuse pour reprendre contact et maintenir le lien est une bonne excuse :)
Autrefois, je croyais que le marketing consistait à pousser : pousser mes idées vers les yeux et les oreilles du public, pousser à travers des murs d'apathie ou d'incrédulité (...) Mais en fait, en marketing, il s'agit davantage de « tirer », de faire venir les gens à soi, le faisant passer de l'extérieur de votre cercle social à l'intérieur, les amenant progressivement du statut d'étranger distant à celui de proche collaborateur.
J'adore cette formulation qui résume bien l'évolution du marketing depuis l'avènement du web.
Prochain plat sur le menu : le branding ! Restez connecté(e) !
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